Sujet: [solo][flashback] None of them could understand Jeu 20 Avr - 16:54
Petite, Emma adorait sa famille, la maison dans laquelle ils vivaient, et la campagne. Aujourd’hui, elle haïssait tout ces points de sa vie. Et au point où elle en était à présent, elle regrettait de ne pas passer ses vacances à Fedelmid, et pourtant, qui sait à quel point certains dans cette école l’irritait au plus haut point. Pourtant elle savait. Elle savait qu’elle pourrait outrepasser son mépris pour certains abrutis si cela la laissait loin de sa mère et du trouduc’ en chef comme elle se plaisait à l’appeler. Son beau-père. Il n’avait rien de beau, ça, c’était une évidence à peu près sûre. Sa moustache du dimanche relativement similaire à certains acteurs pornographiques humains des années 80, sa carrure de militaire mal luné, et son début de calvitie ridicule le rendaient particulièrement repoussant à ses yeux. Ça, et le fait qu’il l’avait faite interner dans un hôpital psychiatrique.
Petite, elle aimait son père biologique de tout son cœur. C’était pour elle un modèle dans la vie, un homme juste, et droit, qui faisait toujours les choses biens. Jusqu’à ce qu’il quitte sa mère pour refaire sa vie avec une autre elfe. A partir de ce point, Emma lui avait voué une haine sans borne, peut-être même égale à celle que lui inspirait son beau-père. Si il n’avait pas quitté sa mère, cette dernière n’aurait pas été celle qu’elle était à présent. Elle n’aurait pas épousé le trouduc’ en chef, et Emma aurait eu un semblant de vie équilibrée. Elle, et tous ses frères et sœurs. Ils méritaient au moins ça. Certains, comme Louise, n’avaient pas eu la chance de connaître la paix et une famille unie. Au lieu de ça, elle devait se taper les deux cotés de son être, Elfe comme Semi, et supporter les frasques de certains membres de sa famille de détraqués.
Quand elle s’était réveillée dans son lit le lendemain du début des vacances, Emma avait espéré pour la première fois de sa vie qu’elle était au dortoir des Felissis, et que Seerca allait débarquer d’une minute à l’autre pour lui balancer tout un tas d’obscénités. Mais ce n’était pas le cas. Elle se trouvait dans la chambre la plus déprimante qu’il ai été donné à une adolescente de quinze ans, et elle regretta amèrement de s’être réveillé. Ses rêves étaient plus confortant que l’odeur immonde du bacon grillé qui envahissait déjà la maison. D’ailleurs, elle n’avait pas émergé de son plein gré.
« Emma, debout maintenant, on ne servira pas le petit-déjeuner une deuxième fois ! »
L’interpellée jeta un coup d’oeil encore endormi à son réveil. Huit heures au compteur. Une vaste blague. Qui réveille ses enfants à une heure pareille pendant les vacances ?
« Je ne me répéterai pas ! Debout ! »
Sa mère, de sa douce voix angélique, tambourina une dernière fois la porte, et Emma put entendre ses pas l’éloigner dans le couloir, puis le grincement de l’escalier. Au moins, elle pourrait se lever dans le calme. C’était un début. Encore dans le brouillard, elle rejeta sa couverture avec un manque de force conséquent, et se redressa sur son lit. Elle tangua, avant de se laisse tomber en avant, recroquevillé dans une sorte de position fœtale réconfortante. L’espace d’une seule seconde, elle faillit se rendormir, avant d’entendre un « EMMA ! » hurlé à l’étage d’en dessous qui la revigora aussitôt.
« J’arrive ! » Cria-t-elle comme elle put d’une voix étouffée par ses draps, mais comme il n’y eut pas d’autres cris, elle en conclut que son message était parvenu à destination.
Sans volonté, elle se traîna jusqu’à son armoire à glace, se déshabilla et sortit le premier t-shirt qui lui tomba sous la main, ainsi qu’un vieux jean qu’elle ne portait jamais mais suffisamment confortable pour être porté un jour tel que celui-là. Son reflet dans le miroir lui renvoyait une image peu flatteuse. Son maquillage de la veille avait coulé, et ses cheveux emmêlés lui donnaient un air de sorcière. Elle fit un tour rapide dans la salle de bain pour corriger tout ça avant de se lancer à l’assaut de ce qui l’attendait dans le salon.
Lorsqu’elle fit son entrée dans la pièce où mangeait déjà toute sa famille, seul son frère et sa sœur lui souhaitèrent le bonjour, auquel elle répondit par un marmonnement incompréhensible. Elle se laissa tomber mollement sur sa chaise, sous le regard courroucé de sa mère qui lui aboya aussitôt de bien se tenir. Comme elle ne voulait pas déclencher une dispute aussi tôt, la jeune fille se résolu à suivre les ordres de sa génitrice. Elle étala de la confiture sur une tartine grillée, et but une tasse de café avant de laisser tout le monde à leur activité et de débarrasser sa propre part. L’instant d’après, elle fut dehors.
Le jardin n’était plus entretenu depuis longtemps. Les souvenirs d’un magnifique parterre de coquelicots ravivèrent ses plaies intérieures. Elle allait passer par le portillon avant de se rappeler qu’elle n’avait aucune affaire pour s’occuper durant la journée. A contre cœur, elle retourna dans la maison familiale pour remonter dans sa chambre.
Comme ils habitaient à la campagne, il n’y avait pas grand-chose à faire dans le coin, sinon de la randonnée et du camping. Certains touristes venaient parfois tester les activités locales, mais comme elle n’en avait pas grand-chose à faire de la divination, Emma ne se mêlait pas aux gens. De toute façon, il n’y avait que des vieux pour aimer une chose aussi ennuyante. Elle, elle préférait le grand air.
Une fois remontée, Emma troqua sa pair de tongs pour enfiler des chaussures de randonnée, prit le premier sac à dos qui lui tomba sous la main pour y fourrer un vieux ciré délavé, une bouteille d’eau – très utile pour des activités en plein air – , sa réserve de gâteaux secs, une paire de jumelle – on ne sait jamais –, un roman au cas-où elle trouverait un coin tranquille pour bouquiner, l’appareil photo que lui avait offert son père aux dernières vacances, et la voilà partie pour la journée. Elle avait de l’argent dans sa poche de jean, aussi pourrait-elle s’acheter un sandwich quand elle aurait trop faim.
Lorsqu’elle redescendit pour la seconde fois, sa mère l’attendait dans l’entrée.
« Tu pars ? »
Emma haussa les épaules et continua son chemin jusqu’à la porte. Arrivée à ce niveau, sa génitrice lui agrippa le bras pour la stopper dans son élan. Son regard était sévère, et sa bouche pincée renvoyait l’image d’une mégère qu’Emma ne voulait pas voir sur le visage de sa mère.
« La moindre des choses, c’est de répondre à ta mère lorsqu’elle te pose une question ! »
« Ouais ouais, c’est bon, lâche moi ! »
Elle se dégagea brutalement de l’emprise de sa mère, lui fit face une fraction de secondes, le regard enflammé, et elle sentait sa peau brûler de milles feu. Son pouvoir, qu’elle ne maîtrisait pas, risquait de se manifester d’une minute à l’autre, et elle ne voulait pas brûler la maison de son enfance pour une histoire aussi bête.
« Tu n’as pas à me parler comme ça ... » Articula Mme Coven, bouillant elle aussi. Mais face au regard haineux de sa fille, elle ne put tenir plus longtemps, et détourna les yeux avant de s’en aller sans un mot.